Je fais écho à l’article de maman yuki sur le blog papapanique, qui elle-même réagissait au post du blog les idées de Lauréa. Je voulais répondre dans les commentaires et les lignes ont commencé à déborder… j’ai basculé sur mon blog ! Merci à toutes les deux pour avoir lancer le sujet et merci pour ces très beaux textes qui m’ont beaucoup touché !
L’objet du débat est une campagne d’affiche qui circule pour appeler à une manifestation des fameux « Manif pour tous », et oui… encore eux ! Leur nouvelle trouvaille : « Touche pas à nos stéréotypes de genre ! ».
Touche pas mon pote oui, mais touche pas à nos stéréotypes de genre ???? sérieux… En 2014……. Je suis sans voix. J’essaye de rédiger cet article, mes doigts ripent sur le clavier, ma tête fulmine, j’ai des fourmis dans les jambes. Je me lève éplucher une pomme pour la compote de michoco. Je reviens devant l’ordinateur. Je me relève ranger tout ce qui traîne dans la maison. Je refulmine… Mais c’est quoi ce délire ?! « Pas touche à nos stéréotypes de genre », c’est quoi même ce slogan ? Il tourne en boucle dans ma tête, je n’arrive pas à l’en sortir… Alors voici l’affiche :
J’approfondis mes recherches sur le net, il paraît que la présidente de La Manif pour tous plaide pour «l’humour ». Décidemment en ce moment il ne fait vraiment pas bon rire de tout…
Et puis je souffle un bon coup, me recentre sur moi, mes valeurs, mon éducation. Sur celles que je veux transmettre à mon fils aussi. Et ça donne ça :
Petite Yaye :
Avant de me définir comme une femme ou un homme, je me définis avant tout comme une personne et j’essaies d’élever mon petit garçon dans le même sens, tout comme l’ont fait mes parents pour moi (merci mon papa et ma maman à moi !).
J’ai toujours pratiqué les activités que je voulais. J’ai essayé la danse, je n’ai pas aimé, je me suis mise au volley. Dans la cour de récré je jouais au foot, aux billes, au docteur, à la maman. J’avais les cheveux courts, très courts. ça me dérangeait seulement quand la boulangère disait : « Alors jeune homme, qu’est-ce que je te sers ? », puis j’ai eu des boucles d’oreilles et ça a réglé le problème. Dans le voisinage on était un groupe d’enfants mixtes, idem avec les cousins. Au collège ma « bande » c’était des garçons et des filles. Et j’ai des milliers de bons souvenirs de ces époques. J’ai adoré cuisiner avec ma maman, j’ai adoré bricoler avec mon papa, mais avant tout car ils ont partagé ces moment- là avec moi avec plaisir. Entre frères et sœurs on a toujours eu les mêmes tâches ménagères à accomplir à la maison, même si bibinou le petit garçon de la tribu était le dernier donc un peu chouchouté… Mes parents m’ont accompagnée pour que je me sente à l’aise dans mon corps, mais sans me bousculer, m’imposer des choses car ça c’était pour les filles ou ça pour les garçons. Ils m’ont aidée à me forger ma propre identité, sans tenir compte justement des stéréotypes, simplement en me sentant bien dans mes pompes. En fait j’ai des souvenirs d’ « enfance » plus que des souvenirs de « petite fille », même si j’étais très jalouse de ma petite sœur quand mon papa lui brossait ses longs cheveux ! (Je me rattrape sur grand choco qui fait ça très bien !). Je rigole encore des photos de classe : certaines filles avaient des froufrous dentelles rose, d’autres étaient en jean basket, moi j’avais des jupes matière jogging !!
En attendant Michoco :
Je ne voulais pas connaître le sexe de mon bébé durant la grossesse. C’était un choix que je ne l’ai pas regretté. D’ailleurs aux échographies j’étais tellement concentrée pour savoir si tout allait bien pour crevette, que je ne pensais même pas à le rappeler au gyneco. Heureusement il l’avait écrit en lettre capital au feutre rouge en haut de mon dossier : « NE PAS DIRE LE SEXE » !
La première fois que j’ai été confronté à cette question garçon ou fille ? C’est quand j’ai voulu préparer la layette de michoco. Alors y’a le rayon fille ET le rayon garçon, même à 0 ou 1 mois ! Et bien ça n’a pas été si facile que ça pour trouver des choses pouvant aller pour les deux… On en a même rit avec les copines, finalement c’était plus simple quand nous on était des bébés dans les années 80 si on s’en réfère aux photos !
Quand il est né, j’étais sonné, éblouie, boulversée, tous les adjectifs que vous voulez, mais j’ai complètement oublié de demander ou regarder le sexe, c’était mon bébé, il était né et il était vivant, chaud, mouillé, tout contre moi !
Michoco :
Je lui donne à voir les choses de la vie, enfin j’essaye ! Il rencontre des filles et des garçons, il joue à la cuisine quand je cuisine, au bricolage quand je bricole. Il a des voitures, des poupées, des ballons, des instruments de musique et il choisit ce qu’il aime. Certains jour il adore ses poupées à qui il donne à manger ou tend un mouchoir au cas où elles seraient enrhumées comme lui ! Certains jours il ne lâche pas son ballon des mains (ou des pieds). D’autres jours ce sont les voitures : les petites, les vraies dans la rue, y’a que ça qui existe dans son petit monde de bonhomme de bientôt 13 mois. Qu’il joue avec des filles ou des garçons, je ne vois pas la différence. Bien sûr avec l’âge ça va sans doute évoluer, mais pourquoi vouloir forcer les stéréotypes ?
Autour de nous :
Je me demande souvent comment je l’élèverai si c’était une fille. Je pense de la même manière, je pense… j’espère ! En revanche dans mon entourage, je n’ai pas la réponse. Je ne suis pas sûre que la nounou le sorte autant jouer dehors si c’était une fille ou que le gardien et les gars dehors jouent avec lui. Parfois je me dis que c’est plus facile à dire et à faire puisque michoco est un garçon. Je suis curieuse d’avoir une fille pour voir et vivre la différence. Au Sénégal les rôles restent très sexués (enfin… en France aussi !) et on ne voit pas beaucoup de petites filles jouer dehors, surtout passé un certain âge (6-7 ans ?). En grandissant, elles participent aux tâches ménagères tandis que les gars jouent au foot. C’est plus vrai en ville qu’à la campagne où les enfants jouent dehors plus facilement et se retrouvent forcément, garçons et filles mélangés.
Parfois je suis en colère, parfois je me dis qu’au moins les filles se préparent mieux à ce qui les attend à l’avenir. Et puis je me dis aussi que les possibilités restent infinies puisque jouer au foot pour une jeune fille sénégalaise est beaucoup mieux perçu ici qu’en France, que je suis entourée de femmes commerçantes, chefs d’entreprises, entrepreneuses et que les bancs de l’assemblée nationale sont bien plus fournies de pagnes qu’à paris ! D’ailleurs ici personne ne s’étonne d’avoir une femme Premier Ministre ou ne la critique juste parce qu’elle est une femme.
Alors je reprends le cours de ma vie d’ « être humain » et continue à élever mon enfant pour lui donner pleins de clés à son trousseau !
Et vous, comment jonglez-vous avec les stéréotypes ?