Ma chère Marie,
Cet instantané singulier, comme les autres, je te l’envoie sous forme de lettre.
Tu voulais que l’on réfléchisse sur le thème des feuilles d’automne et j’ai bien rigolé…
Après les chats qui sont très mal vus au Sénégal, mon ciel si bleu qui me semblait alors si gris à l’époque, voilà que tu me parles d’une saison qui n’existe pas ici !
Nous avons 4 mois d’été que l’on appelle d’ailleurs « hivernage » et 8 de printemps mais pas un seul jour d’automne au compteur… Les feuilles ne dorent pas au soleil de l’été indien, elles brûlent terrassées par la chaleur. Elles ne rougissent pas aux premiers frémissements de l’automne et ne font pas virevolter leurs roux reflets.
Mais je n’allais pas renoncer pour si peu… (ça je n’ai pas besoin de l’écrire, tu me connais déjà !)
Je me mettais à rêver d’histoires d’enfants qui transforment les feuilles en drapeaux de châteaux forts, à inventer les aventures d’une feuille de manguier qui voulait changer de couleur, et puis l’idée m’est venue, tout simplement : ouvrir les portes que l’on se ferme tout seul, créer ses propres opportunités, tracer son chemin sans attendre des autres ou s’appesantir sur son sort. J’allais créer mon propre automne ! Chez moi !
Il nous restait une grande feuille de papier. Michoco avait envie de dessiner, Grand choco semblait disposé à participer, « on va faire un arbre ! » ai-je lancé à la cantonade.
Parce que les feuilles d’automne pour moi ce sont les promenades du week-end en famille, ce sont des bouquets de feuilles, des collages dans des herbiers tous ensemble autour d’une grande table de cuisine en attendant que les châtaignes grillent au four.
Nous avons dessiné, peint, rigolé, discuté, nous avons créé. En famille.
Essayant de se respecter, de respecter les envies et les choix des uns, les façons de faire et de voir des autres.
Et voici nos feuilles d’automne !
Très imparfaites et plus belles que si je les avais dessinées seules, plus belles que si je ne les avais peintes qu’avec Michoco, aujourd’hui j’ai vécu pleinement ce pour quoi je me bats depuis des mois : à six mains, c’est encore mieux !
Je n’ai pas pleuré sur mon sort, sur ce moment si rare qui doit être somme toute si banal pour une famille « lambda », j’ai juste profité de l’instant comme il se présentait, même s’il restera trop rare à mon goût.
Aussi beau qu’une balade en forêt, aussi coloré que dans mes souvenirs d’herbiers, mais en mieux encore !
Fière d’avoir pris les devant, d’avoir entraîné ma famille dans mon chemin d’automne, j’ai improvisé un « bienvenue dans notre maison ! » et accroché notre arbre (une fresque de 2m x 1m) dans l’entrée de notre maison, pour que chacun puisse se nourrir, en entrant chez nous, de la chaleur qui s’est dégagée de ce moment singulier !
Voilà Marie, pour du singulier, avec moi tu es servie à chaque fois je crois.
Je t’embrasse de si loin et pourtant de si près et finis cette lettre en souriant à l’idée d’être un de tes petits rayons de soleil de la journée :-)